L'époustouflant parcours de Clément - ou comment devenir un talentueux runner par excès de gourmandise
Découvert lors du challenge "Et si je participais à tous les semi-marathons d'Alsace en 2015 ?", Clément, 40 ans, est doté d'un fascinant pouvoir d'adaptation. En l'espace de quelques mois, il est passé du statut de débutant en surpoids à celui de runner tout en muscles - et aux résultats brillants.
Trouvant dans l'entraînement assidu un moyen d'équilibrer son goût des bonnes choses, il s'est érigé au rang de marathonien après seulement 10 mois d'expérience en course à pied, et une perte de poids conséquente. L'exercice étant même devenu trop facile, il est alors passé au stade de meneur d'allure sur marathon, à peine deux ans et demi après avoir réalisé son premier footing.
Blagueur et taquin en toute occasion, Clément a aussi le sourire quand il court. Toujours partant pour prendre du galon, il devient très sérieux lorsque la compétition est de mise. Et quand il se surpasse dans l'effort, c'est une expression de triomphe que sa physionomie laisse nettement transparaître.
Record - encore - battu en 1h14, le 14 février 2016, sur le semi-marathon de Saarbruck (Allemagne) - © Crédit photo : Energis.de
Un nouvel équilibre grâce à la course à pied
Clément s'est mis à la course à pied début 2013. Fin octobre de la même année, il achevait son tout premier marathon. Avec un chrono improbable et bluffant de 3h25.
Avant même de s'interroger sur son potentiel, c'est d'abord pour perdre du poids que Clément a commencé à courir. "Après les fêtes fin 2012, je pesais quasiment 100kg", explique-t-il. Gourmand et bon vivant, "j'ai toujours eu énormément de mal à réguler mon poids". L'approche d'un poids à trois chiffres l'amène à considérer que "le moment était venu pour moi de réagir."
Grâce à l'entourage de collègues de travail en majorité sportifs, y compris au niveau de la direction, il trouve la motivation de s'embarquer dans l'aventure du running. "Je suis responsable commercial chez Able, à Obernai (67). Dans la société, plus de la moitié des salariés font régulièrement du sport, notamment à l'heure du déjeuner (vélo, VTT, course à pied, marche). J'ai donc commencé à courir avec un de mes patrons, Marc, qui est triathlète. Il m'a énormément encouragé".
Gêné par son surpoids, "au début, j'avais du mal : c'était assez pénible de trimbaler toute cette masse." Mais le jeu en vaut la chandelle, puisque rapidement, les kilos superflus s'amenuisent, pour se stabiliser désormais, "à un poids de 76kg, ce qui représente 22kg de moins que début 2013. Je ne fais aucun régime, je continue à être gourmand. Le seul fait de faire du sport - à haute dose il est vrai - me permet d'équilibrer". Donc s'il continue, "c'est pour ne plus reprendre de poids. Avis aux amateurs !"
En parallèle, Clément découvre l'autre effet magique de la course à pied : "courir me permet de me vider la tête. Or pour être efficace dans mon job, j'ai besoin d'être détendu et zen." La course à pied est un moyen efficace d'accéder à cela.
Impossible de renoncer aux plaisirs de la bouche pour Clément (à gauche), qui savoure la troisième mi-temps au Bike & Run du Riesling 2015, à Scherwiller, avec Rémy, son ami traileur.
Être bien entouré et conseillé
Le pied ainsi mis à l'étrier, Clément constate avec plaisir que, au fur et à mesure des séances, la difficulté s'estompe. "Petit à petit, j'ai commencé à aller courir seul, puis à faire des sorties de plus en plus longues (12 à 15km) et de plus en plus fréquentes."
Au bout de quelques mois de ce train-là, pour briser une routine qui commençait déjà à s'installer, Clément décide de se fixer un objectif. Lui qui a toujours évolué en compétition dans le sport (en équipe de foot de 6 à 40 ans, et en tennis de table de 7 à 25 ans), a appris à se familiariser très tôt avec la notion d'objectifs et de performance. Il se positionne alors sur quelque chose "qui était pour moi irréalisable à ce moment-là : le marathon de Strasbourg", qui allait se tenir en octobre 2013.
Conscient de ses lacunes de novice et donc de son besoin fondamental de bien s'entourer pour être performant, Clément se fait "coacher par mon autre patron, Eric, qui est également coureur et triathlète. Il a un diplôme d'entraîneur d'athlétisme et, ensemble, on a fixé un premier objectif - ambitieux à mes yeux : réaliser les 42,195km en moins de 3h30".
Pour tenir cet engagement, "j'ai suivi un plan d'entraînement sur 9 semaines, en intégrant deux semi-marathons (Rosheim et Sélestat) qui se sont très bien déroulés physiquement et en termes d'allure." Ainsi, avec des chiffres redondants, Clément termine à Rosheim en 1h34'34, puis à Sélestat en 1h26'26.
De très bons scores, auxquels il parvient grâce à un entraînement assidu. "Je m'entraîne tous les jours, avec parfois du bi-quotidien". En période préparatoire, "je m'entraîne 7 à 9 fois par semaine, et j'ajoute du vélo quand c’est réalisable, pour la récupération active. Soit un total de 110 à 130km à diverses allures".
Clément, pour tenir ses objectifs ambitieux, suit un entraînement rigoureux - avec le sourire.
Partager des moments de victoire - avec et pour les autres
Par la suite, conquis par le format marathon, ses pas l'amènent à celui de Paris en 2014, qui "restera un super souvenir. J'avais ciblé 3h10, et j'étais très en avance sur l'objectif. Alors j'ai pris le luxe de ralentir délibérément sur les trois derniers kilomètres, afin de profiter un maximum de la fin de course et des milliers de spectateurs. J'ai pris un super pied, j'ai vu ma compagne dans la dernière ligne droite, on s'est fait quelques signes, et j'ai passé la ligne sous un tonnerre d'applaudissement". Sous les vivats, il se sent "champion du monde pendant quelques instants : quel trip !"
Début 2015, il s'inscrit au challenge 21,1, car "sachant que j'allais faire quelques-unes des épreuves, je me suis dit pourquoi pas ? Je trouvais le principe original et motivant. Pour moi les semi-marathons sont toujours préparatoires aux marathons, ils s'inscrivent dans des périodes assez chargées en kilomètres. Dans ces conditions, il est plus facile de s'inscrire à la course que de la réaliser dans le temps escompté". Ceci dit, sur la période, il progresse régulièrement et bat même son record à Sélestat, en 1h18.
En septembre 2015, il est meneur d'allure au marathon de Colmar. "Un excellent moment !" se remémore-t-il. "Partager son expérience avec des novices sur la distance comme j'ai pu le faire, cela restera à n'en pas douter un super souvenir. De plus, l'organisation était au top, et il y avait vraiment une grosse ambiance sur le parcours. Les bénévoles étaient très enthousiastes".
En un mot comme en mille : "c'était génial !" À tel point qu'à l'arrivée, "plusieurs coureurs me sont tombés dans les bras, m'ont même embrassé, en me remerciant de les avoir emmenés à leur objectif. Vivre ceci a été très gratifiant". Une expérience tellement forte que Clément estime avoir pris "en tant que meneur d'allure autant de plaisir voire davantage qu'en réalisant un super chrono sur une course".
Avant le départ en tant que meneur d'allure 3h30 sur le premier marathon de Colmar, avec Jérôme Schwander, son pote de l'ACCA à gauche, et Dominique Chauvelier (athlète sarthois, 4 fois champion de France de marathon) au centre.
De l'importance d'être constant
Avec le bref mais conséquent recul qu'il a, Clément pense qu'aucune course n'est facile : "cela dépend vraiment de l'objectif que l'on se fixe. Et personnellement, je cours toujours à fond mes différentes courses, donc ça n'est jamais facile".
Ce qui explique peut-être que, dans son palmarès fulgurant, Clément accepte mal les revers de fortune. Il estime ainsi que son "dernier marathon à Strasbourg en octobre 2015 n'a pas été une réussite : je suis parti bien trop vite, me laissant entraîner par l'avant de la course. J'ai commencé à avoir des crampes au 33e kilomètre, alors que je n'en avais jamais eu auparavant. J'étais extrêmement déçu après coup, car j'avais fichu 9 semaines de préparation en l'air pour n'avoir pas respecté les consignes de régularité - le sésame pour la réussite d'un marathon."
Il faut dire aussi que la semaine précédant la course, "nous étions allés à Lille et Bruges pour fêter mes 40 ans. J'ai bien profité des spécialités locales, et les écarts se paient cash sur ce type de course". Et "quand on est gourmand, ça reste très difficile". Les résultats étaient pourtant au rendez-vous, car il termine cette fois-ci en 2h53'13, se classant 11e au scratch - et devient même grâce à ce score 3e des Championnats d'Alsace de marathon dans sa catégorie. Mais cela restait probablement trop loin de son record de Barcelone, début 2015, en 2h48'53.
Malgré cette contre-performance toute relative, Clément garde une volonté de fer, et reste motivé par un entraînement, "par tous les temps, sous la pluie, dans la neige, le froid, contre le vent..." Car en course à pied comme ailleurs, les objectifs se renouvèlent sans cesse, et avec eux les chances de succès.
Donc, pour rester en forme en 2016, Clément va à nouveau faire le "marathon de Barcelone le 13 mars prochain, avec mes copains de l'ACCA Didier et Jérôme, avec pour ambition affichée de passer sous les 2h42, voire mieux". Pour satisfaire sa curiosité de nouveautés, il prendra part "au Duathlon de Betschdorf le 1er mai, afin de découvrir la discipline - un vieux fantasme de mon patron Marc de me voir sur ce type d'effort !". Les 6h de Mulhouse sont l'objectif du second trimestre, "pour me tester en endurance, car je pense être caréné pour ça, dans l'optique de passer sur 100km d'ici peu".
Sans oublier quelques courses locales, ni, bien sûr, au second semestre 2016, "le marathon de Colmar une nouvelle fois en tant que meneur d'allure. Pour le reste, on verra en fonction des résultats, et surtout de l'envie." Car notre vaillant Clément a pour l'instant faim de kilomètres et de progression. À ce stade, il semble évident qu'un long temps passera avant qu'il ne soit complètement rassasié.
L'envie de beaux gestes, et de moments forts, comme cette arrivée main dans la main avec son fils Oscar, sur le marathon de Strasbourg 2015, resteront moteurs pour Clément. © Crédit photo : Christian Kehlhoffner, Courir en Alsace.
Clément Guntz, 40 ans, Scherwiller (67)
Ses records perso :
- 10km de La Wantzenau (2015) : 36'15
- Semi-marathon de Sarrebruck (2016) : 1h14'49
- Marathon de Barcelone (2015) : 2h48'50
Son entraînement :
- En période préparatoire : 7 à 9 fois par semaine, "et j'ajoute du vélo quand c’est réalisable, pour la récupération active. Soit un total de 110 à 130km à diverses allures".
- Le reste de l'année : 5 fois par semaine + 1 à 2 sorties vélo ou VTT
Licencié à l'AC Centre-Alsace, "je m'entraîne quasiment toujours seul car les créneaux du club ne correspondent pas à mon emploi du temps. Je ne cours que rarement le soir pour le moment. Je préfère courir le matin vers 5h45, ou à la pause-déjeuner (de temps à autre avec mon ami Rémy pour du fractionné rapide). En période de préparation marathon, je ne m'entraîne que sur bitume, les sorties de récupération étant libres. Le reste du temps : route, chemin, et un peu en montagne (surtout en hiver). Je ne m'entraîne spécifiquement que sur marathon actuellement, avec 2 à 3 épreuves par an. D’ici le second semestre, je voudrais essayer de faire plus de séances avec le groupe de l’ACCA, car cela ne peut que me faire progresser encore un peu, mais j'ai envie également et surtout de profiter de l’ambiance de ce groupe, qui est vraiment excellente et bon enfant !"
L'un de ses moments forts :
"J'ai eu le privilège d'accompagner Didier Stein lors de son record du monde des 12h de course sur tapis. Avec Jérôme, mon acolyte, nous sommes restés avec lui de minuit à 6h du matin. C'était tout simplement phénoménal, nous l'avons vu passer par tous les états. Lorsque nous sommes partis à 6h, il était cuit mais a malgré tout réussi à reprendre le dessus pour battre également le record de France des 24h. C'est incroyable d'avoir pu participer à cet exploit hors-normes, avec un athlète tout aussi hors-normes."
Son avis sur la course à pied en Alsace : "je trouve qu'il y a trop de courses, et que du coup le niveau général baisse. Personnellement, je préfère être 30e à une course relevée, avec un bon chrono, que 5e à une course insignifiante".
L'auteur, Elyse Moreigne
Editrice de Plaisir du sport en Alsace, passionnée de langages écrits, nageuse, coureuse et randonneuse,
parfois triathlète, engagée pour valoriser la pratique sportive en Alsace en tant que source de bien-être, d'enthousiasme, de dépassement de soi !
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